Résultats de l’enquête et synthèse : confiance et connaissance de la blockchain

Valentin Blanc, Fernanda Chatelard, Erika Dewald, Marc Durand, Benjamin Fragny, Youness Garah, Lolita Gillet, Benoît Lopez, Isabelle Maleyre, Baptiste Saint-Martin, Éric Seulliet, Michael Sigda, Jérôme Tixier, Inès Trojette, Yannick Vincent et Cathy Zadra-Veil

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Blanc, V., Chatelard, F., Dewald, E., Durand, M., Fragny, B., Garah, Y., Gillet, L., Lopez, B., Maleyre, I., Saint-Martin, B., Seulliet, É., Sigda, M., Tixier, J., Trojette, I., Vincent, Y., & Zadra-Veil, C. (2021). Résultats de l’enquête et synthèse : confiance et connaissance de la blockchain. Dans C. Zadra-Veil (dir.), Blockchain & immobilier. Le smart bail. Mis en ligne le 06 février 2023, Cahiers ESPI2R, consulté le 25 avril 2024. URL : https://www.cahiers-espi2r.fr/1063

Trois grandes thématiques permettent de structurer les principaux résultats de l’enquête menée : la confiance et la connaissance de la blockchain (atouts, droit, acceptation de l’usage, sécurité), la capacité de la blockchain à améliorer les pratiques professionnelles et, enfin, les freins à l’usage de la blockchain.

Le découpage de ce questionnaire a été construit en plusieurs étapes. Nous avons d’abord cherché à identifier le degré de connaissance des acteurs de l’immobilier quant à la blockchain et leur niveau de confiance envers elle.

À priori, l’hypothèse de méconnaissance de la blockchain dans sa globalité est levée pour le panel de répondants. Par ailleurs, les plus âgés en ont globalement une meilleure connaissance que les plus jeunes.

Les acteurs de l’immobilier ont entendu parler, comme la majorité des citoyens, des cryptomonnaies :
• 75,51 % des interviewés connaissent les cryptomonnaies. 40 % seulement des répondants sont informés de la tokenisation ;
• 34 % de notre panel connaît le terme de « smart contract ».

Il est à remarquer qu’il est courant que les répondants ne connaissent que la cryptomonnaie. Cependant, il est rare qu’ils entendent seulement le terme de tokenisation ou celui de smart contract. Lorsqu’ils connaissent l’un de ces deux termes, ils sont informés aussi, en général, d’au moins une autre application de la blockchain.

De plus, une majorité des répondants (66,33 %) voit la blockchain comme un registre incorruptible, alors que seulement 17,82 % ont un avis négatif sur la question et 15,84 % ne se prononcent pas.

Notons que lorsque nous demandons aux répondants d’indiquer des applications de la blockchain, les mots suivants ressortent :

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Les atouts de la blockchain

Les atouts de la blockchain sont :
• pour 67 % des interviewés, l’amélioration de la vitesse des transactions.
• pour 62 % : la non-falsifiabilité et la sécurisation ;
• pour 59 % : la transparence des opérations ;
• pour 57 % : la décentralisation du système.

Trois grandes thématiques permettent de structurer les principaux résultats de l’enquête menée : la confiance et la connaissance de la blockchain (atouts, droit, acceptation de l’usage, sécurité), la capacité de la blockchain à améliorer les pratiques professionnelles et, enfin, les freins à l’usage de la blockchain.

Cependant, ces résultats cachent des disparités. En effet, si les agents immobiliers, les syndics, les promoteurs immobiliers et les métiers de conseil considèrent que la non-falsifiabilité et la sécurisation de la base de données constituent un atout de la blockchain, les marchands de biens, les asset managers et les directeurs immobiliers sont plus négatifs sur ce point, et l’avis des gestionnaires de patrimoine et des investisseurs-financeurs est plus mitigé. D’autre part, la transparence des opérations est un point fort qui souffre de peu d’avis négatifs, tout comme l’amélioration de la vitesse des transactions et la réduction des coûts. Le fait que la blockchain permette de couper des intermédiaires est un avantage fortement discuté par les répondants. Les marchands de biens et les syndics pensent qu’il s’agit là d’un atout. Cependant, les agents immobiliers et les investisseurs-financeurs sont négatifs sur ce point. Les autres professions sont par ailleurs globalement mitigées. Enfin, notons que la réduction de la fraude n’est clairement pas un atout de la blockchain pour notre panel. Seuls les agents immobiliers, les gestionnaires de patrimoine et les promoteurs immobiliers ont une opinion nuancée sur cette question.

Enfin, remarquons que la qualité de la blockchain la moins considérée est son immuabilité. Seuls 20 % des répondants estiment ce critère comme étant un atout, et aucune profession interrogée ne le met en avant.

Figure 22. Les atouts de la blockchain selon notre échantillon.

Figure 22. Les atouts de la blockchain selon notre échantillon.

Réalisation : les auteurs.

Les principales propositions d’application de la blockchain faites par les répondants sont représentées dans le nuage de mots ci-après. Elles concernent :

  • la gestion de l’immeuble, des transactions et des documents aussi bien au niveau financier, des baux ;

  • la phase de construction, gestion et traçabilité des matériaux, labels et normes... ;

  • la dimension financière des transactions entre les dif­férents acteurs de l’immobilier.

L’acceptation par les partenaires et les clients

Concernant l’acceptation de la blockchain par les partenaires et les clients des interrogés :
• 57 % répondent favorablement ;
• 33 % ne sont plutôt pas d’accord ;
• 10 % pensent que non ;
• 60 % des interrogés n’ont pas répondu.

L’acceptation de l’usage de la blockchain par les partenaires et les clients est un élément essentiel de la capacité à introduire cette technologie dans les pratiques professionnelles. Les chiffres ci-dessus permettent d’affirmer que, pour ceux qui ont répondu à cette question, les parties prenantes externes seraient plutôt favorables à l’utilisation de la blockchain.

Qu’en est-il des freins énoncés ? Beaucoup des justifications reposent sur la notion de confiance : confiance en la technologie, les usages de la blockchain, qui font écho à la méconnaissance, freins culturels à l’usage d’une technologie.

Quelques verbatim : « Le principe même de la blockchain est la distribution et l’adoption par tous, donc aujourd’hui il est difficile de l’adopter. » ; « La notion de blockchain est encore très floue. Son utilisation est réduite, et les connaissances que la population en a ne permettent pas une utilisation optimale de celle-ci. »

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L’adéquation de la blockchain au droit

La blockchain est en adéquation, au moins partiellement, avec le droit pour :
• 85,71 % des 60-69 ans ;
• 59,26 % des 20-29 ans ;
• 1/3 des moins de 49 ans, au moins, ne savent pas.

En ce qui concerne le droit, quel que soit l’âge, une minorité de répondants considère que la blockchain n’est pas autorisée par le droit, et au moins un tiers des moins de 49 ans ne savent pas. Ce sont les plus âgés qui sont les plus positifs sur l’adéquation de la blockchain au droit.

Chez les plus jeunes, 59,26 % des 20-29 ans, 52,94 % des 30-39 ans et 51,72 % des 40-49 ans estiment que le droit autorise au moins partiellement l’usage de la blockchain. Les répondants appartenant aux tranches d’âge les plus hautes sont beaucoup plus positifs sur cette question. Ils sont en effet 71,43 % des 50-59 ans et 85,71 % des 60-69 ans à penser que la blockchain est au moins partiellement autorisée par le droit.

Globalement, toutes les professions sont mitigées sur la question. Seuls les directeurs immobiliers et les répondants ayant une activité de conseil sont majoritairement positifs vis-à-vis de l’adéquation de l’usage de la blockchain au droit. Les exemples d’usages non autorisés de la blockchain mentionnés par les répondants sont surtout centrés sur les actes notariés, les usages des bases de don­nées, l’usage des données personnelles à des fins de discrimination, ou commerciales.

La confiance quant à l’authenticité et à la signature d’un document

Concernant la confiance dans la blockchain pour authentifier ou signer un document :
• 70,07 % des interrogés répondent favorablement ;
• 16,83 % seulement de répondants sont passifs ;
• 12,87 % sont des détracteurs.

Globalement, 70 % des populations de chacun des métiers qui constituent notre échantillon font confiance à la blockchain pour authentifier et signer un document. Seuls les investisseurs-financeurs, les asset managers et les gestionnaires de patrimoine sont plus mitigés.

La confiance quant à la validation des termes d’un bail

Font confiance à la blockchain pour valider les termes d’un bail et le signer :
• 75 % du panel interrogé, quasiment ;
• 83,34 % des promoteurs immobiliers ;
• 85,73 % des 60-69 ans.

Cette confiance, dans la situation plus précise d’un bail, est un peu plus élevée que pour l’authentification et la signature d’un document.

14 % des répondants sont indifférents, et 12 % ne font pas confiance à la blockchain dans ce domaine précis. Les métiers les plus réticents sont les asset managers et les investisseurs. Les agents immobiliers (à 82,36 %) et les promoteurs immobiliers (à 83,34 %) sont ceux qui font le plus confiance à la blockchain pour valider les termes d’un bail et le signer. Aucun des promoteurs ne fait preuve de défiance à son égard en la matière, contrairement à 14,7 % des agents immobiliers.

Ce sont les personnes les plus âgées parmi les répondants qui font majoritairement le plus confiance à la blockchain pour valider les termes d’un bail et le signer. C’est ainsi le cas de 85,72 % des 50-59 ans et de 85,73 % des 60-69 ans. Aucun des 60-69 ans ne sont des détracteurs de la blockchain en matière de bail, et seulement 14,29 % d’entre eux sont indifférents. 76,47 % des 30-39 ans et 72,4 % des 40-49 ans font confiance à la blockchain. En revanche, ce n’est le cas que de 62,95 % des 20-29 ans.

Globalement, 65 % de notre panel fait confiance à la blockchain pour à la fois authentifier un document et valider un bail.

La confiance quant au transfert de propriété

Font confiance à la blockchain pour le transfert de propriété :
• 60 % environ des répondants, avec le maintien du rôle du notaire comme tiers qui valide et reste garant ;
• 71,42 % des 60-69 ans ;
• 66 % des asset managers ne sont pas de cet avis.

« Pratique déjà utilisée chez les notaires. À contrario d’un bail, la fiabilité et la sécurité d’un notaire (officier ministériel) donne une force probante à la signature même si elle est électronique. À contrario si un bail commercial est signé par le biais d’une agence, le risque est plus élevé. »

En observant au sein des classes d’âge, 59,25 % des 20-29 ans font confiance à la blockchain pour effectuer un transfert de propriété. Ils représentent 58,92 % des 30-39 ans, 44,82 % des 40-49 ans, 61,91 % des 50-59 ans et 71,42 % des 60-69 ans. 25,93 % des 20-29 ans sont indifférents. C’est aussi le cas de 41,38 % des 40-49 ans, 8 % des 50-59 ans et 14,29 % des 60-69 ans mais d’aucun des 30-39 ans.

L’observation par métier nous indique que ce sont les asset managers qui font le moins confiance à la blockchain pour effectuer un transfert de propriété. En effet, c’est le cas de 66 % d’entre eux. Les gestionnaires de patrimoine et les investisseurs-financeurs sont mitigés sur cette question.

D’autres professions sont plus positives sur ce sujet. Par exemple, seulement 26,47 % des agents immobiliers ne font pas confiance à la blockchain pour réaliser un transfert de propriété. Ce taux est de 15,79 % chez les promoteurs immobiliers. Le taux d’adhésion des agents immobiliers est de 61,77 % et celui des promoteurs est de 57,9 %. Par ailleurs, seulement 11,76 % des agents immobiliers et 26,31 % des promoteurs immobiliers sont indifférents.

La confiance quant à la validation des actes administratifs par la commune

Quelle est la position des différents professionnels interrogés vis-à-vis de la possibilité d’utiliser la blockchain pour valider des actes administratifs à l’échelle communale comme l’exercice du droit de préemption, l’autorisation et le refus du permis de construire ?

Sont favorables à l’utilisation de la blockchain par la commune pour valider les actes administratifs :
• 70 % des personnes interrogées ;
• 100 % des 60-69 ans ;
• 50 % des asset managers.

Si nous déclinons par tranche d’âge, le taux de personnes interrogées favorables à la blockchain est de 65,38 % chez les 20-29 ans 70,59 % chez les 30-39 ans, 72,41 % des 40-49 ans, 70 % des 50-59 ans et 100 % des 60-69 ans des professionnels de l’immobilier qui ont répondu à notre enquête.

En ce qui concerne ceux qui sont indifférents, ils représentent 19,23 % des 20-29 ans, 11,76 % des 30-39 ans, 13,8 % des 40-49 ans, 5 % des 50-59 ans.

L’observation par métier nous indique que les asset managers et les promoteurs immobiliers sont les plus réticents. Ils ont globalement un avis mitigé sur cette question. En effet, 50 % des asset managers et 57,14 % des promoteurs ont un avis positif contre 76,47 % des agents immobiliers de notre panel et 72,19 % des directeurs immobiliers. La confiance est de 70 % en activité de conseil et de 66,67 % des investisseurs-financeurs.

Globalement, la très grande majorité des personnes des différentes professions sont soit indifférentes, soit favorables à l’usage de la blockchain par la commune pour les actes administratifs.

La confiance quant au transfert de données sensibles

Font confiance à la blockchain pour transférer des données sensibles (comme la feuille de paie, la déclaration de revenus) :
• 60 % environ de notre panel ;
• 76,19 % des 50-59 ans ;
• 90,01 % des interrogés exerçant une activité de conseil en immobilier.

La proportion d’interrogés favorables à l’usage de la blockchain pour le transfert de données sensibles est de 64,7 % chez les 30-39 ans, de 55,18 % des 40-49 ans, de 76,19 % des 50-59 ans et 71,43 % des 60-69 ans.

L’observation par métier nous montre que ce sont les métiers de conseil qui sont les plus favorables, à 90,01 %, suivis des investisseurs-financeurs pour 66,67 % puis des agents immobiliers (58,82 %) et, enfin, des promoteurs immobiliers à 57,89 %. Les directeurs immobiliers sont mitigés sur la question (37,5 % d’avis positifs), et les asset managers sont les plus réfractaires, avec 83,33 % d’avis défavorables.

Figure 22. Les atouts de la blockchain selon notre échantillon.

Figure 22. Les atouts de la blockchain selon notre échantillon.

Réalisation : les auteurs.

Valentin Blanc

Étudiant, MIFIM, ESPI

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Enseignante-chercheuse, département Droit, ESPI

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