L’utilisation de la blockchain et des smart contracts protégerait davantage contre la fraude. Cependant, il reste la question essentielle de la fiabilité et de la véracité des informations intégrées sur la blockchain, qui vont ensuite permettre l’exécution du smart contract.
D’après une étude de Goldman Sachs intitulée Blockchain profiles in innovation. Putting Theory into Practice (Schneider, Blostein, Lee, Kent, Groer& Beardsley, 2016), enregistrer les biens immobiliers sur un registre distribué permettrait à l’industrie américaine d’économiser 2 à 4 milliards de coûts. Actuellement, les registres de propriété sont décentralisés et la fiabilité des enregistrements sur papier est faible : 30 % sont défectueux. Ces charges induisent des coûts de transaction élevés, qui se situent entre 0,4 et 0,6 % du prix du bien immobilier.
Les faux documents, les fausses listes et les escroqueries locatives sont impossibles lorsque toutes les pièces d’un dossier, les documents de propriété et de contrat sont directement liés à la blockchain (à condition, évidemment, que les informations implémentées dans la blockchain aient été préalablement validées par un tiers de confiance). Les enregistrements sur la blockchain et les contrats intelligents sont immuables, permanents et transparents. Personne ne peut les modifier et, à chaque transaction de la propriété numérique, tout le monde sur le réseau peut le savoir. Ainsi, Aurélien Onimus, dans son ouvrage La blockchain. Une révolution dans l’immobilier (2020), explique que nombre de documents échangés lors de la transaction ne sont pas les originaux (ceux transmis par mail, par exemple) et qu’ils subissent parfois des modifications au cours même de la vente (évolution du permis de construire, de la situation personnelle des contractants...) : le risque de signer une « “mauvaise” version d’un acte » (Onimus, 2020, p. 68) se trouve alors réduit si les originaux sont stockés sur la blockchain, tandis que toutes les corrections éventuelles sont tracées. Mais il faut pour cela que la blockchain soit utilisée dès la première étape de la transaction.
Une problématique fondamentale est celle de la fiabilité et de la véracité des données intégrées et stockées sur la blockchain, qui autorisent ensuite l’exécution du smart contract. Cette fiabilité ne peut être certaine que si les informations et les documents sont validés par un tiers désintéressé, par exemple le notaire. En cas d’insertion de faux, tout le système serait vérolé à la base ! La signature électronique, qui génère un certificat, représente une aide précieuse à l’authentification de l’émetteur. Comme le résume Maître Boyer, cofondateur de MyNotary1, « le vrai problème que l’on a aujourd’hui, c’est que l’on a un droit de la preuve qui repose sur un monde matériel et que l’on passe au monde immatériel » (Onimus, 2020, p. 72).
À court terme, on peut d’ailleurs s’interroger aussi sur l’accélération du temps de la transaction, puisqu’un oracle devra toujours procéder aux vérifications réglementaires nécessaires. D’ailleurs, cela questionne et nuance la désintermédiation (voir p. 38). Cependant, la blockchain et le smart contract offrent, une fois ces validations faites, une fluidité et une symétrie d’informations qui permettent de gagner un temps précieux par la suite. Concernant la fiabilité des données sur les transactions, certaines initiatives sont à noter, telles que celles d’Imbrex. Cette start-up prime les personnes qui contribuent à la vérification des informations, dont la validation finale est soumise à « un vote communautaire » (Onimus, 2020, p. 60).