Bosvieux et Coloos (2016) nous rappellent que le logement est imposé à divers titres : sa détention, son utilisation, le revenu qu’il génère, sa transmission à titre onéreux ou gratuit, les travaux nécessaires à sa production ainsi que son entretien ou son amélioration. Cette imposition est inégale entre les types de logement, et la fiscalité du locatif privé présente la particularité d’être éminemment fluctuante. L’objet de l’impôt est de procurer des ressources à l’État et aux collectivités locales.
Dans cette partie, nous présentons les différents impôts qui s’appliquent à l’immobilier et au foncier. Nous analysons les potentiels effets sur l’environnement, notamment en termes d’impacts sur l’étalement urbain et l’artificialisation des sols (voir le tableau 1). Nous avons choisi en effet d’élargir l’analyse de la fiscalité à l’ensemble des actifs immobiliers pour prendre en compte les externalités.
Tableau 1. Prélèvements s’appliquant à l’immobilier et au foncier, et effets potentiels sur l’étalement urbain et/ou l’artificialisation des sols
Prélèvement |
Fait générateur |
Contribuable |
Assiette |
Bénéficiaire |
Effets sur l’étalement urbain et/ou l’artificialisation des sols |
Droits de mutation à titre onéreux (DMTO), majorés en 2014. Les DMTO concernent aussi les terrains urbanisables. Les DMTO comprennent les droits d’enregistrement et la taxe de publicité foncière (TBF). Au montant des droits s’ajoute la contribution de sécurité immobilière au taux de 0,10 % (ancien salaire du conservateur). |
Transfert de propriété. DMTO : achat d’un bien immobilier. |
Acheteur, via les frais de notaire. |
Pourcentage sur le prix d’acquisition. Pour les terrains à bâtir (TAB), il existe un régime de droit commun ainsi qu’un « régime de faveur » qui donne lieu au seul paiement d’un droit fixe de 125 € si l’acquéreur (assujetti ou non à la TVA) s’engage à construire dans les quatre ans. |
Communes, départements, État. |
Les DMTO pourraient favoriser l’étalement urbain : le pourcentage d’imposition est plus faible pour l’acquisition d’un logement neuf (0,715 % vs entre 5,11 et 5,81 % dans l’ancien selon les départements). Concernant l’achat d’un TAB, cela favoriserait également l’artificialisation des sols puisqu’il existe une exonération. |
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG). Les DMTG concernent aussi les terrains urbanisables. |
Transfert de propriété (donation ou succession). |
Redevables des droits de succession ou de donation, c’est-à-dire les héritiers, les donataires ou les légataires, quel que soit leur domicile. |
Pourcentage sur la valeur vénale réelle. Il existe un barème progressif des taux, applicable après abattements qui sont fonction du lien de parenté. |
État. |
Incertains : aucune différenciation par type de bien, neuf ou ancien. À noter tout de même des exonérations temporaires en faveur des donations de TAB si engagement à construire des locaux neufs d’habitation et en faveur des immeubles neufs à usage d’habitation (articles 790 H et I du Code général des impôts), ce qui ont donc pu favoriser l’étalement urbain. |
Impôt de solidarité sur la fortune immobilière, ISF (2018). |
Détention. |
Propriétaire. |
Valeur effective. |
État. |
Incertains : cela dépend de la localisation des biens. |
Imposition des plus-values immobilières (PVI), accrue en 2011, puis en 2012. La PVI inclut : l’impôt sur le revenu, IR (19 %) ; des prélèvements sociaux et autres contributions (17,2 %) ; le cas échéant, la taxe forfaitaire à titre onéreux sur les cessions de terrains nus devenus constructibles (10 %) ou la taxe sur les PVI élevées. Cette dernière ne concerne pas les TAB. La PVI rentre dans le champ de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), additionnelle à l’IR (2011). |
Transfert de propriété. |
Vendeur si non occupant. |
Plus-value immobilière. |
État. |
La PVI pourrait favoriser l’étalement urbain : pour les terrains constructibles en zones tendues, l’acheteur bénéficie d’un abattement exceptionnel s’il s’engage à construire des logements collectifs (jusqu’au 30/12/2020) et, depuis le 01/01/2021, dans les zones couvertes par une grande opération d’urbanisme ou par une ORT1. Abattements également en fonction de la durée de détention (exonération totale au bout de 22 ans pour les TAB). |
Taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB)/taxe sur le foncier bâti (TFB). Les immeubles bâtis de l’État, des collectivités territoriales ou bien encore des ports autonomes sont exonérés de la TFB. Les voies publiques n’acquittent ni la TFB ni la TFNB. |
Détention d’une propriété fixée au sol présentant un caractère de véritable construction, y compris les aménagements faisant corps avec elle. |
Propriétaire ou usufruitier d’une propriété bâtie. |
Valeur locative : la base d’imposition de la TFPB est égale à la moitié de la valeur locative cadastrale diminuée d’un abattement de 50 %. TFPB = revenus cadastraux * taux votés par les collectivités territoriales. |
Collectivités locales : communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). |
La TFPB vise à limiter le taux de vacance des logements. Certaines exonérations2 rendent complexe l‘évaluation de l’impact sur l’étalement urbain. |
Taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB). Depuis 2011, la région et le département ne perçoivent plus la TFPNB. Pour compenser cette suppression, une taxe additionnelle à la TFPNB est mise en place. |
Détention d’une propriété non bâtie. |
Propriétaires ou propriétaires utiles (usufruitiers, par ex.) de propriétés non bâties de toute nature. La taxe additionnelle s’applique aux terrains constructibles3. |
Revenu cadastral (valeur locative cadastrale – 20 %). Une majoration forfaitaire est due pour les terrains constructibles situés en zone tendue (entre 1 et 5 €/m2). Taxe additionnelle : majoration de la valeur locative (sans dépasser 3 % d’une valeur forfaitaire moyenne au m2). Elle dépend de la tension en logements de la commune d’implantation. |
Collectivité territoriale. Taxe additionnelle : communes et EPCI. |
La TFPNB contribue à l’étalement urbain car l’objectif est de contraindre financièrement les propriétaires à céder leur terrain, en particulier s’il est constructible et situé en zone tendue. Cependant, ce peut être nuancé par le fait que la valeur locative cadastrale est généralement bien inférieure à la valeur réelle. |
Taxe sur la valeur ajoutée (TVA), sur TAB, construction, assurance construction, attestation immobilière, frais de notaire, de géomètre, d’avocat, d’architecte, etc. |
Transfert de propriété (terrains et logements neufs), construction neuve. |
Acheteur, maître d’ouvrage. |
Prix d’achat. La TVA est appliquée à des taux différents en fonction des produits ou des services imposés. Le taux normal est fixé à 20 % (logements, travaux) ; le taux intermédiaire à 10 % ; le taux réduit à 5,5 % (zones ANRU). |
État. |
Mise en place d’une fiscalité écologique : aides et allègement des taxes si certains critères environnementaux sont validés par l’entreprise. Dans l’immobilier : pas de TVA pour la rénovation ; 20 % de TVA en cas de construction neuve. À part dans les zones ANRU, la taxe n’aura pas plus de conséquence sur l’étalement urbain, car la TVA est commune à tout achat. |
Transfert (frais de notaire et d’agence). |
Acheteur. |
Rémunération des notaires et commissions d’agence. |
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Travaux. |
Propriétaire. |
Montant des travaux. |
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Taxe d’aménagement, TA (2012), ou prélèvements liés à la construction, rassemblant elle-même plusieurs taxes : taxe locale d’équipement (TLE) ; taxe départementale des espaces naturels et sensibles (TDENS) ; participation pour dépassement du plafond de coefficient d’occupation des sols (COS) ; versements pour dépassement du plafond légal de densité (PLD) ; taxe départementale pour le financement des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE). |
La TA finance en priorité les infrastructures de transport nécessaires à l’urbanisation. |
Bénéficiaire de l’autorisation de construire ou d’aménager. La TA vise toutes les opérations de construction, reconstruction ou agrandissement de bâtis existants à partir du moment où celles-ci obligent à une autorisation d’urbanisme. |
Assiette forfaitaire par emplacement. De 2 000 € à 5 000 € selon la délibération de la collectivité territoriale. Pour calculer le montant de la TA, il faut multiplier la surface taxable par la valeur forfaitaire taxable par m2 de surface, puis multiplier ce résultat par le taux voté par la collectivité territoriale. |
Commune, département et région. La TA sert au financement des équipements publics communaux et intercommunaux (réseaux, voiries). |
Pour lutter contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain, France Stratégie (Fosse et al., 2019) recommande d’exonérer totalement de TA les projets qui ne changent pas l’emprise au sol du bâti (surélévation, rénovation, reconstruction) et de financer la renaturation en ajoutant une composante « artificialisation » à la TA et en en reversant les recettes pour financer les opérations de renaturation des sols et de densification du foncier bâti existant4. Depuis 2012, les taux de la TA peuvent varier d’un secteur à un autre au sein d’un territoire. Une collectivité peut ainsi, par l’instauration d’un taux bas, favoriser la densification en centre-ville, la reconstruction de la ville sur la ville ou la requalification de friches urbaines, ou, au contraire, pénaliser l’étalement urbain en instaurant un taux plus élevé pour les implantations en périphérie. Par ailleurs, la différence de valeur forfaitaire utilisée pour le calcul de la TA conduit à ce que les parkings couverts intégrés à une construction soient taxés entre deux et huit fois plus que ceux de surface (Sainteny, 2018). |
Taxe sur les surfaces commerciales (TaSCom). |
La TaSCom est déclenchée lors de la création d’un commerce de détail (établissement commercial permanent, de stockage et de logistique) dont la surface de vente (SDV)5 est > à 400 m² ou pour les commerces de < 400 m² situés dans des centres commerciaux. Pour les redevables de la taxe au titre de la cessation définitive d’activité de l’établissement en cours d’année, la TaSCom est calculée sur la base des éléments de la période allant du 1er janvier jusqu’à la date à laquelle est intervenue la cessation. Sont donc hors du champ de la taxe : les établissements de commerce de gros qui s’adressent à une clientèle composée de professionnels se livrant à des achats pour les besoins de leur activité ou de la collectivité ; les établissements dont l’activité consiste à des prestations de services |
La TaSCom est due par l’exploitant des établissements, quelle que soit leur forme juridique, qui ont une activité de vente au détail (> ou = à 460 000 € HT) et qui remplissent les conditions suivantes : la date d’ouverture initiale de l’établissement est postérieure au 1er janvier 1960 ; l’établissement existe au 1er janvier de l’année au titre de laquelle la taxe est due. |
La TaSCom est calculée sur la base des éléments de l’année précédente. Un montant est appliqué par m2 de surface de vente. Montant de droit commun : si CA/m² < 3 000 € : 5,74 €/m² ; si CA/m² > 12 000 € : 34,12 €/m². De plus, il existe un calcul particulier pour les entreprises ayant un CA entre 3 000 et 12 000 €/m26. Réductions : 30 % pour les commerces à titre principal de meubles, d’automobiles, de machinisme agricole et de matériaux de construction ; 30 % pour les jardineries et pépiniéristes, les animaleries ; 20 % pour les établissements, dont la SDV est < à 600 m², réalisant un CA < ou = à 3 800 €/m² ; franchise de 1 500 € pour un établissement situé en zone urbaine sensible (ZUS). Les trois premières sont cumulables. Majorations : 30 % pour les établissements > 5 000 m², réalisant un CA annuel HT/m² > à 3 000 € ; 50 % pour les établissements dont la SDV > 2 500 m2. Le montant de la taxe peut être modulé, par la collectivité territoriale, par l’application d’un coefficient multiplicateur (entre 0,8 et 1,2). |
Communes et EPCI sur le territoire desquels est situé l’établissement imposable, plus la majoration de 50 % de la TaSCom est perçue au profit de l’État, et 30 %, en fonction de la taille du commerce et de son CA. |
Le taux de la TaSCom ne diffère pas selon le lieu d’implantation des grandes surfaces. Cela favorise leur installation en périphérie, là où le foncier est moins onéreux. Cela induit une artificialisation additionnelle. Les commerces peuvent être dissuadés de s’installer dans certaines villes. Une mesure est à l’étude pour que les centres logistiques qui ne disposent pas de SDV (plateformes e-commerce, par ex.) soient aussi concernés par cette taxe car ils contribuent à l’étalement urbain7. Cependant, les majorations peuvent tout de même freiner l’étalement urbain puisqu’elles sont fonction de la SDV. Par ailleurs, le caractère quelque peu aléatoire de la possible modulation de la TaSCom peut être vu comme un moyen pour les collectivités d’ajuster dans un sens ou dans un autre l’implantation des commerces, et donc favoriser plus ou moins l’artificialisation des sols. |
Taxe forfaitaire sur les cessions de terrains nus devenus constructibles (2007). |
Cession à titre onéreux de terrains nus qui ont été rendus constructibles par un classement au PLU dans une zone urbaine (ZU) ou une zone en aires urbaines (ZAU). |
La taxe s’applique aux cessions réalisées : (1) par les personnes physiques soumises à l’IR afférent aux PVI des particuliers ; (2) par les sociétés et groupements soumis à l’IR afférent aux PVI des particuliers ; (3) par les contribuables qui ne sont pas fiscalement domiciliés en France assujettis à l’IR, soumis au prélèvement dans les conditions prévues à l’article 244 bis A du Code général des impôts. |
L’assiette de la taxe est par principe égale à la plus-value réalisée. Le prélèvement est de 10 % de l’assiette définie. |
La taxe forfaitaire est, en principe, déclarée et payée au service de la publicité foncière, mais les bénéficiaires sont les communes et les EPCI |
L’assiette étant égale à la plus-value, et la valeur d’un terrain non constructible étant très faible, cette taxe de 10 % va venir en supplément du prix du foncier et pourrait empêcher le promoteur de lancer un projet, sa marge devenant trop faible. Cela pourrait donc avoir un effet de ralentissement de l’étalement urbain. Parallèlement, vu la rareté des terrains constructibles, certains promoteurs seront aussi tentés de déplacer la taxe par une hausse des prix du logement. |
Taxe de défrichement. |
À la suite d’une demande d’autorisation de défrichement, si le défricheur ne souhaite pas reboiser l’espace, il devra s’acquitter de la taxe. Déclenchée par le fait d’être propriétaire de l’espace mais aussi de dégrader l’espace forestier. |
Propriétaire du terrain ou personne mandatée : État, collectivité locale, propriétaires forestiers privés, associations de préservation de l’environnement bénéficiant de la maîtrise foncière de l’espace. |
Montant minimum de 1 000 €, mais proportionnel à la surface du terrain. Hors zone de défrichement : pas de taxe. Exonérations : (1) les jeunes bois de < 30 ans (hors réserves boisées, plantations compensatoires et de restauration de terrains en montagne) lorsque la destination de ces terres était autre que forestière auparavant ; (2) les projets en application de servitude d’utilité publique ; (3) les projets réalisés sur un terrain de < 5 000 m² entièrement clôturé contenant une habitation (avant travaux). |
Fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB). Le FSFB soutient l’investissement forestier, l’animation territoriale et la recherche- développement. Par extension, les collectivités locales qui profitent de ces aménagements. |
Les montants de la taxe ne sont pas incitatifs à ne pas défricher : la valeur du foncier d’un terrain boisé est toujours plus faible que celle des terrains bâtis. Il y a finalement une incitation à défricher. L’impact est considéré comme faible par rapport à la motivation de marché (Fosse et al., 2019). |
Taxe fiscale sur assurance construction. Taxe fiscale sur assurance dommages-ouvrages. |
La date d’échéance des primes ou des cotisations, quelles que soient la date de conclusion du contrat et du paiement effectif, constitue le fait générateur de la taxe. |
L’assurance dommages-ouvrages est obligatoire pour tout maître d’ouvrage, notamment le particulier qui fait construire sa maison ou qui procède à une rénovation importante. L’assurance doit être souscrite avant l’ouverture du chantier. |
Environ 9 % du coût total de la construction déclarée résultant du montant définitif des dépenses de l’ensemble des travaux afférents à la réalisation de l’opération de construction, toutes révisions, honoraires, taxes et, s’il y a lieu, travaux supplémentaires compris8. |
État, collectivités. |
Cette contrainte financière sert à inciter les constructeurs et les particuliers à concevoir de petites surfaces, ce qui réduit l’emprise au sol construite et limite donc l’étalement urbain. Il y a toujours l’option de déplacer la taxe vers un renchérissement du prix du logement. |
Participation pour le financement de l’assainissement collectif (PFAC). Elle remplace la participation pour accordement à l’égout (PRE) depuis 2012. Elle n’est pas obligatoire. Elle est considérée comme une redevance pour service rendu (contribution à l’amortissement du réseau public). La PFAC et la TA au taux majoré pour des raisons d’assainissement ne peuvent se cumuler. La PFAC peut donc être instituée sur le territoire de la commune où le taux de la TA n’excède pas 5 %. |
Date du raccordement au réseau public de collecte des eaux usées de l’immeuble, de son extension ou de la partie réaménagée à partir du moment où ce raccordement génère des eaux usées supplémentaires. |
Propriétaire de l’immeuble soumis à l’obligation de raccordement au réseau public de collecte des eaux usées. Pour un immeuble collectif : promoteur ou syndic de copropriété. |
Barème généraliste ou plafonnement à 80 % du coût HT de fourniture et de pose d’une installation d’évacuation individuelle (le coût de branchement est déduit) ou d’une mise aux normes. |
La commune, la métropole de Lyon, l’EPCI ou le syndicat mixte compétent en matière d’assainissement collectif peuvent l’exiger. |
Impact potentiel variable, en fonction des modalités de calcul choisies. Si, comme certaines communes le font, les coefficients appliqués sont plus élevés pour les maisons, la PFAC peut être un frein à l’étalement urbain, de même lorsque la surface créée est prise en compte. |
Participation aux équipements publics de la zone d’aménagement concerté (participation ZAC). Les équipements publics concernés sont les ouvrages d’infrastructure et de superstructure. Deux cas de figure : convention entre la commune ou l’EPCI et l’aménageur ; convention entre les lotisseurs ou les constructeurs, l’aménageur et la commune ou EPCI pour les terrains n’ayant pas fait l’objet d’une cession, location ou concession d’usage consentie par l’aménageur. |
Conventionnel. |
Aménageur ou constructeur. |
Le montant de la participation ZAC et/ou des prix de cession des charges foncières sont négociés (signature d’une convention). La participation ZAC doit respecter les principes de proportionnalité et de nécessité, en fonction des besoins des futurs habitants, usagers. Lorsque la capacité des équipements excède ces besoins est due la fraction du coût proportionnelle à ceux-ci. |
Aménageur ou collectivité créatrice de la zone si la convention le prévoit. |
Impacts difficiles à appréhender. Étant donné que la participation ZAC dépend du type, de la taille de l’opération ainsi que de ses besoins en équipements publics, cela pourrait freiner l’étalement urbain. Mais les termes de la négociation sont par essence variables et peuvent favoriser l’occupation des sols. |
Participation équipement public exceptionnel (PEPE). Concerne principalement les ouvrages d’infrastructure (voirie, station d’épuration, réseau d’électricité et d’eau potable, dispositif d’écoulement des eaux potables, équipement pour la défense incendie) d’une installation à caractère commercial, industriel, artisanal ou agricole. Ne sont donc pas concernés l’habitat, les établissements à caractère administratif ou les bureaux. |
Octroi de l’autorisation d’urbanisme. |
Bénéficiaire de l’autorisation de construire. |
Le coût de l’équipement rendu exceptionnellement nécessaire pour l’opération (pouvant atteindre 100 %). |
Communes. |
De par leur caractère exceptionnel, les montants peuvent être très élevés et représenter un obstacle à l’étalement urbain, en particulier quand il s’agit d’une zone commerciale pour laquelle, par ex., il faut créer un rond-point. Mais tout dépend des termes de la convention. |
Participation financière aux équipements publics dans le cadre d’un projet urbain partenarial (PUP) via une convention (2009) avec possibilité de concertation préalable. Deux cas de figure : PUP unique (terrain d’assiette du permis) ; zone de PUP (périmètre défini par la collectivité, si les équipements publics concernés desservent plus de terrains que prévu dans la première convention). |
Convention. |
Propriétaires fonciers, lotisseurs, aménageurs ou constructeurs. |
En fonction de la nature des projets et des besoins en équipement. Principes de proportionnalité et de nécessité. Négociation du montant. La participation peut être sous forme de foncier. Exonération de la part communale de la TA (10 ans max.). Non cumul avec la TA des constructeurs en ZAC, la taxe Programme d’aménagement d’ensemble (PAE), la taxe de participation pour voirie et réseau (PVR). |
Commune, établissement public, représentant de l’État dans le cadre d’opérations d’intérêt national (OIN), certaines collectivités territoriales ou établissements publics. |
Les conventions PUP concernent les zones urbaines ou les zones à urbaniser, de grandes opérations d’urbanisme. Au vu, de plus, des possibilités de préfinancement, ce dispositif souple offre aux collectivités une contribution financière rentable en contrepartie de quoi elles peuvent plus facilement autoriser certains projets qui contribuent à l’étalement urbain. Ces derniers sont en plus sécurisés par la convention voire la concertation. En fonction de la localisation et de la qualité des équipements publics prévus, le montant de la participation peut se répercuter sur le prix de vente du logement. À noter que l’opportunité de participer en apport de foncier peut permettre des renaturations compensatoires. Le jeu de la négociation est libre. |
Redevance d’archéologie préventive, RAP (2003). |
Date de : la délivrance de l’autorisation d’urbanisme ; la naissance d’une autorisation tacite de construire ou d’aménager ; la décision de non-opposition à une déclaration préalable ;PV constatant l’achèvement de constructions réalisées sans autorisation ou n infraction. |
Bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme. La RAP est due dès lors que les travaux affectent le sous-sol, quelle qu’en soit la profondeur. |
Même assiette que pour la TA. Taux actuel : 0,4 % de la valeur forfaitaire de l’ensemble. |
Direction générale des finances publiques (DGFIP). |
La RAP ne concerne pas, notamment, les reconstructions sur fondations existantes, les travaux sur bâtiments existants ainsi que la surélévation seule. Elle peut donc favoriser la densification plutôt que l’étalement. |
Contribution sur les revenus locatifs (CRL). |
Déclaration de revenus. |
Bailleurs personnes morales et organismes passibles de l’IS au taux de droit commun, organismes sans but lucratif et personnes morales ou organismes non soumis à l’IS et ne relevant pas du régime fiscal des sociétés de personnes. |
Revenus locatifs nets (taux : 2,5 %) des locaux d’habitation ou professionnels. Concerne les loyers des immeubles achevés depuis plus de 15 ans. |
État. |
Pourrait contribuer à l’étalement urbain. De plus sont exonérés notamment : les habitations à loyer modéré (HLM), les immeubles faisant partie de villages de vacances ou de maisons familiales de vacances agréés. |
Taxe sur les logements vacants. Taxe d’habitation. |
Au total, 1 149 communes de 28 agglomérations sont répertoriées en zone tendue (4,7 millions de logements en France). Ces zones sont soumises à la taxe sur les logements vacants (d’au moins un an). Elles sont également éligibles aux dispositifs Pinel et au PTZ (pour le neuf uniquement). |
Propriétaires et locataires. |
La taxe d’habitation peut être également majorée pour les résidences secondaires meublées. Afin de lutter contre la rétention foncière et les comportements spéculatifs, les propriétaires de terrains non bâtis et constructibles situés en zone tendue se voient appliquer une majoration forfaitaire correspondant à 3 €/m2. |
Communes. |
Pourrait contribuer à lutter contre l’étalement urbain, si la taxe est suffisamment incitative afin d’éviter la vacance. |
Versement pour sous-densité, VSD (2012). |
Délivrance d’un PC ou d’une déclaration préalable (DP). |
Bénéficiaire d’une autorisation de construire lorsque la densité est inférieure au seuil minimal de densité (SMD) fixé par les communes ou les EPCI. |
Valeur du terrain. Le montant calculé dépend de la surface manquante pour atteindre le SMD. Le VSD ne peut être > à 25 % de la valeur du terrain à la date de dépôt ou de la demande. |
Communes ou EPCI qui l’ont institué. |
Le propre du VSD est de limiter l’étalement urbain et d’inciter à densifier. Mais le VSD est facultatif, et des communes avoisinantes peuvent de pas retenir le même SMD. Or, l’outil peut être contre-productif à une échelle plus large en l’absence de coordination des politiques locales. L’efficacité du SMD dépend aussi du seuil choisi (Avner et al., 2013). Si le VSD était obligatoire, l’artificialisation des sols pourrait être réduite (Pourquier & Vicard, 2017). En renchérissant le coût des constructions peu denses, le VSD apparaît, en théorie, comme un outil idéal pour limiter l’artificialisation des sols (Sainteny, 2018). La loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 prévoit de supprimer le VSD. |
Imposition du revenu foncier. |
Exploitation. |
Propriétaire bailleur. |
Revenu net de la location. |
État. |
Parmi les revenus fonciers imposables : ceux issus des immeubles non bâtis donnés à bail à construction. La réduction de la conclusion de ce type de baux, et donc des constructions, qui pourrait s’en suivre, est à nuancer du fait de leur durée longue et de la propriété des bâtiments édifiés, censée revenir au bailleur, qui confèrent à ce dernier des avantages non négligeables. |
Redevances domaniales. |
Occupation privative excédant le droit d’usage appartenant à tous. |
Par toute personne qui occupe ou utilise le domaine public d’une personne publique (titulaire de l’autorisation). |
En fonction des avantages de toute nature procurés. Redevance annuelle. |
État. |
Les constructions sur le domaine public sont généralement temporaires, donc l’impact sur l’artificialisation des sols est limité. |
Taxe générale sur les activités polluantes, TGAP (1999). Hors TGAP carburant. |
Les faits générateurs sont nombreux, en fonction de l’activité polluante (déchets, émissions polluantes, ICPE, lubrifiants, huiles, lessives et matériaux d’extraction, dont les granulats). Globalement : réception de déchets dangereux ou non dans le cadre d’une ICPE relative au stockage ou au traitement thermique des déchets ; transfert ou délégation de transfert des déchets à l’étranger dans une installation équivalente ; émission dans l’atmosphère, par une ICPE, d’une des 18 substances taxables ; première livraison ou utilisation, en France, d’huiles et lubrifiants, de préparations pour lessives et préparations assimilées et de matériaux d’extraction. |
Entreprises dont l’activité ou les produits sont considérés comme polluants. |
Poids des déchets polluants, donc variation en fonction des performances environnementales de l’ICPE. Son montant et le taux applicable varient selon les catégories d’activité et de produit. |
Douanes puis affectation à l’Agence de la transition écologique (ADEME) et au budget général. |
Le secteur du BTP est le premier producteur de déchets. Les ICPE accueillent les déchets de chantier tandis que les besoins en granulats pour la construction sont fondamentaux. La TGAP pourrait contribuer à la lutte contre l’étalement urbain si elle se répercute sur le prix du stockage des déchets, ce qui est assez incertain (CGDD, 2016), de même que sur le prix des granulats. L’objectif est plutôt de favoriser l’emploi de matériaux recyclés. |
Taxe sur la création de locaux à usage de bureaux, de locaux commerciaux et de locaux de stockage en Île-de-France, TCB-IDF (construction). |
Délivrance du PC. DP ou opérations pour lesquelles le début des travaux ou le changement d’usage est intervenu. Pour les opérations non soumises à un régime d’autorisation à partir du 01/01/2016 : le début des travaux ou le changement d’affectation avec travaux. Pour les opérations soumises à un régime d’autorisation à partir du 01/01/2016 : le PV constatant l’achèvement des constructions ou des aménagements. |
Propriétaire des locaux ou titulaire d’un droit réel portant sur ces locaux. La taxe porte sur les travaux de construction, reconstruction, rénovation, transformation ou agrandissement. |
Surface (re)créée, rénovée ou transformée. Tarif en fonction de la typologie d’actif et de la localisation géographique (quatre circonscriptions). Taxe versée une seule fois, qui ne peut dépasser 30 % de la charge foncière. |
Région Île-de-France. |
Selon les zones, la TCP-IDF est un poste lourd qui peut être un véritable obstacle si elle n’est pas répercutée sur le prix de vente. De plus, le tarif est plus élevé dans les zones déjà extrêmement denses, ce qui pourrait favoriser l’étalement urbain dans d’autres aires moins taxées (voire pas du tout) en la matière. Mais encore faut-il que dans ces zones il y ait un marché. En outre, la tarification n’est pas différenciée selon la nature des travaux, même si une restructuration (démolition-reconstruction) exonère de la TCB-IDF (sauf pour la surface qui excède celle de construction de l’immeuble avant ces travaux). Cela pourrait favoriser une gestion foncière économe. Le zonage n’est pas non plus différencié en fonction de la typologie d’actif. |
Sources : Avner et al., 2013 ; Bosvieux & Coloos, 2016 ; Cerema, 2019 ; CMS Francis Lefebvre ; Lebeau, 2020 ; Pourquier & Vicard, 2017 ; Sainteny, 2018 ; Service-public.fr ; BOFIP ; auteures.
En résumé |
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Prélèvements pouvant favoriser l’étalement urbain et/ou l’artificialisation des sols |
Prélèvements pouvant encourager une gestion économe du foncier |
Prélèvements dont les impacts sur l’étalement urbain et/ou l’artificialisation des sols sont incertains |
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Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) regarde la France comme le pays d’Europe où l’immobilier est le plus taxé. Bosvieux et Coloos (2016) considèrent notre fiscalité comme complexe, mouvante et peu cohérente. Ils recommandent de supprimer les distorsions fiscales qui s’exercent au détriment du logement locatif et des ménages mobiles. Les logements locatifs devraient bénéficier d’un amortissement fiscal pour prendre en compte la production du service de logement. La révision du système fiscal et sa simplification aideraient à la suppression de niches fiscales.
Paty et Riou rappellent que « dans la littérature théorique l’impact d’une taxe foncière sur la taille des villes peut se décomposer en deux effets opposés sur l’étalement urbain. D’une part, une augmentation de la taxe foncière exerce un impact négatif sur l’intensité du développement foncier, ce qui encourage l’étalement urbain. En effet, toutes choses égales par ailleurs, la fiscalité locale tend à décourager l’intensité de l’investissement immobilier, au sens où les constructions comportent des logements de plus petite taille avec moins d’étages. Cette moindre intensité implique d’utiliser plus d’espace pour loger un même nombre de personnes. D’autre part, un second effet transite via le choix des consommateurs de la taille de leur logement. Une augmentation de la taxe foncière accroît le coût du logement au mètre carré et réduit de ce fait la superficie des logements demandés » (Paty & Riou, 2019, p. 1). En conclusion, il serait attendu que la taxe foncière incite à une diminution de la taille du logement en engendrant un accroissement de la densité de population, et donc une diminution espérée de la taille de la ville.
Les pouvoirs publics mobilisent également un cadre fiscal particulièrement confus, près d’une trentaine de taxes s’appliquant aux terrains urbanisables. Malgré l’existence d’un tel volume de taxes, la fiscalité n’a pas été, jusqu’ici, un outil capable de limiter l’étalement urbain ni l’artificialisation des sols. Il faut aussi rappeler que ces taxes constituent des sources importantes de financement des collectivités locales. Par exemple, la taxe foncière représentait en 2017 un montant global de 41 milliards d’euros, contre 22,5 milliards pour la taxe d’habitation et 945 millions pour la TaSCom (Sainteny, 2018 ; Fosse et al., 2019). Il apparaît néanmoins très difficile de mesurer les effets propres de chacun de ces outils sur les dynamiques locales d’artificialisation. Ces dispositifs fiscaux n’ont pas été conçus pour traiter l’enjeu de réduction de l’artificialisation des sols (Fosse et al., 2019). La taxation doit être vraiment élevée pour qu’elle soit dissuasive et agisse en défaveur de l’étalement urbain, sans quoi le gain escompté de l’opération immobilière sera toujours plus motivant. Et ce, en particulier en présence d’un marché dynamique et/ou tendu, bénéficiant des demandes de ménages aux revenus élevés, car il autorise ainsi la répercussion de la taxation sur le prix du logement.
En outre, cela exclut d’autant plus hors de la localisation concernée celles et ceux qui n’ont pas les moyens de ces prix élevés : l’étalement urbain se réalisera donc en périphérie, là où le foncier est potentiellement moins cher, à moins d’une véritable coordination territoriale quant aux taux applicables (Beauvais, Polombo & Callonnec, 2012).
Le comité pour l’économie verte en 2019 (Loisier & Petel, 2019) constate notamment que :
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(i) la taxe d’aménagement (TA) n’a pas évolué dans sa forme, même s’il est possible d’appliquer un taux majoré. La sectorisation des taux n’est que peu mise en place, ni utilisée dans un objectif de maîtrise de l’étalement urbain ;
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(ii) les outils incitatifs permettant de renforcer la densité dans les zones urbaines n’ont pas été systématisés et sont là aussi peu utilisés ;
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(iii) l’imposition des plus-values immobilières (PVI) fait toujours l’objet d’un barème réduisant le taux d’imposition en fonction de la durée de détention, incitant à la rétention foncière.
Sur la capacité d’intégrer la lutte contre l’étalement urbain et plus concrètement contre l’artificialisation des sols, Sainteny (2018) souligne qu’à l’exception du versement pour sous-densité (VSD) (facultatif) et, partiellement, de la TA et de la majoration de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB), soit seulement trois taxes facultatives sur un total de 29, aucune taxe n’est incitative. Les taux d’un certain nombre de taxes s’appliquent à une valeur forfaitaire. Ce mode de taxation n’incite pas à un usage économe des sols. L’application d’un taux croissant en fonction de la surface occupée inciterait davantage à économiser l’espace. Il recommande de modifier ces taux, en les modulant sur la base de critères géographiques, en diminuant le nombre de cas d’exonérations ou d’abattements lorsqu’ils sont contraires à l’objectif recherché et en réduisant nettement la taxation du foncier non bâti, de façon à lui permettre de dégager un rendement net positif minimal. L’auteur remarque également qu’une nouvelle taxe ne serait probablement pas plus mobilisatrice. Si elle l’était, elle entrerait en conflit avec les autres, puisqu’un certain nombre de structures, de budgets, d’équipements dépendent de la poursuite de l’artificialisation des sols pour pouvoir être financés. Ce constat est présent dans la synthèse proposée via le tableau 1 ci-dessus.