Le présent mémoire de recherche s’appuyant sur le constat du manque d’attractivité du territoire pour les classes moyennes et aisées, il est essentiel avant d’aller plus loin d’étayer ces propos à partir de données chiffrées qui nous permettront par la suite de conforter la base de réflexion de la présente étude. Pour ce faire, nous réalisons un état des lieux de la Seine-Saint-Denis, qui se décline en quatre axes principaux :

• une étude socio-démographique du territoire afin de comprendre la structure de la population ainsi que ses besoins. Pour cela, nous exploiterons les données et les statistiques issues des « dossiers complets » de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), annexées au présent mémoire de recherche (Insee, 2021a, b, c, d) ;

• une analyse de la mixité fonctionnelle qui expose les différents types d’entreprises présentes sur le territoire ;

• un travail sur une notion plus subjective, à savoir la qualité de vie dans le département au moyen des avis de la population sur plusieurs aspects tels que la présence de commerces, d’équipements sportifs et de loisirs, etc.

• la question de la densité de population en Seine-Saint-Denis.

Pour assurer la cohérence de cette démarche, nous effectuerons des comparaisons avec des départements similaires à proximité, à savoir les Hauts-de-Seine, le Val-de-Marne ainsi que le département de Paris.

Âge moyen1

La Seine-Saint-Denis possède, après Paris, la population la plus jeune d’Île-de-France, ce qui représente un fort potentiel pour le territoire. En effet, 42,9 % de la population de ce département a entre 15 et 44 ans en 2018, contre 42,6 % dans les Hauts-de-Seine et 41,8 % dans le Val-de-Marne (46,5 % à Paris).

À l’inverse, ce département est le moins vieillissant d’Île-de-France, avec seulement 16 % de sa population âgée de plus de 60 ans en 2018, contre 19,1 % pour les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne et 20,9 % pour Paris.

La Seine-Saint-Denis attire donc beaucoup de jeunes et maintient son taux de population de plus de 60 ans à un niveau relativement bas.

Catégories socioprofessionnelles et taux de chômage2

Comme vu précédemment, la Seine-Saint-Denis est marquée par un fort passé industriel, ouvrier et social. Son histoire a toujours un impact sur la population actuelle du département, observable dans la répartition des catégories socioprofessionnelles de la population de plus de 15 ans.

Nous pouvons constater que, dans ce département, plus de 13 % de la population occupe un emploi ouvrier en 2018 contre 5,4 % dans les Hauts-de-Seine, 8,7 % dans le Val-de-Marne et 4,2 % à Paris.

À l’inverse, le pourcentage de « cadres et professions intellectuelles supérieures » est nettement inférieur aux autres départements, avec 9,4 % des habitants de plus de 15 ans en Seine-Saint- Denis en 2018 contre 25,9 % dans les Hauts-de-Seine, 16,1 % dans le Val-de-Marne et 29,7 % à Paris. Une évolution est toutefois constatée ces dernières années, avec une augmentation du taux de cadres – qui sont 7,6 % en 2008 – et une diminution du taux d’ouvriers – 14,9 % en 2008.

Nous sommes donc face à un début de rééquilibrage des catégories socioprofessionnelles sur le territoire, mais nous pouvons tout de même constater que les écarts sont encore flagrants et que la Seine-Saint-Denis peine à attirer les classes moyennes et aisées (notamment les populations cadres).

Le taux de chômage reste également le plus fort de ces départements, avec 13 % de taux de chômage en 2018 contre 8,4 % dans les Hauts-de-Seine, 9,5 % dans le Val-de-Marne et 9 % à Paris. Le taux d’inactivité, hors étudiants et retraités, est également le plus élevé, avec 12,6 % de la population, contre une moyenne de 6,2 à 8,1 % dans les autres départements.

Nous constatons donc une évolution de la répartition des catégories socioprofessionnelles du département, mais la Seine-Saint-Denis reste parmi les départements proches de Paris celui avec le taux de chômage et d’inactivité le plus élevé, ce qui constitue un facteur défavorable pour le département, tant en termes d’attractivité que de perspectives économiques.

Habitat3

Le taux de propriétaires en Seine-Saint-Denis est relativement proche de celui des départements voisins, mais reste en deçà de ces derniers avec un ratio propriétaires/locataires de 38,8%/59,3% en 2018 contre 42,5%/54,9% pour les Hauts-de-Seine et 45%/52,7% pour le Val-de-Marne.

Par ailleurs, le nombre de locataires HLM y est beaucoup plus élevé : ils représentent 31,9 % des locataires de Seine-Saint-Denis, contre 25 % dans les Hauts-de-Seine et 26,6 % dans le Val-de-Marne.

Il convient également de faire état de la répartition entre maisons et appartements. En effet, la Seine-Saint-Denis est le département qui possède le plus de maisons en comparaison des autres départements du secteur, avec un ratio maisons/appartements de 23,6%/74,6% contre 11,3%/87,3% pour les Hauts-de-Seine, 21,5%/76,7% pour le Val-de-Marne et 0,8%/96,9% pour Paris. Cependant, ce taux de maisons diminue chaque année au profit de la construction de logements collectifs (26,1 % en 2008 et 25,3 % en 2013).

Une autre donnée est également à prendre en compte dans l’étude de l’habitat, à savoir le taux de suroccupation des logements. En Seine-Saint-Denis, le taux de suroccupation des logements (hors studios) est le plus élevé ; il est près de 21 % en 2018 contre une moyenne de 13 % dans les autres départements.

Nous pouvons ainsi constater que la Seine-Saint-Denis a un taux de logements sociaux parmi les plus élevés des départements proches de Paris et un ratio maisons/appartements encore très orienté vers l’habitat individuel.

De plus, le taux très important de logements suroccupés nous révèle également le besoin de création de logements sur le territoire ainsi que la situation de précarité dans laquelle se trouvent de nombreux ménages.

Salaire moyen et taux de pauvreté4

Par rapport aux autres départements étudiés, la Seine-Saint-Denis demeure un espace de fortes inégalités en termes de salaires.

Dans ce département, le salaire horaire net moyen est compris entre 10,5 €/h pour les 18-25 ans et 15,6 €/h pour les plus de 50 ans. En comparaison, ce salaire varie de 11,8 €/h à 30,6 €/h pour les Hauts-de-Seine, de 11 €/h à 21,1 €/h pour le Val-de-Marne et de 12,7 €/h à 32,1 €/h pour Paris.

Malgré un écart de salaire relativement faible chez les 18-25 ans en Seine-Saint-Denis par rapport aux autres départements, celui-ci, au-delà de cette tranche d’âge, est beaucoup plus marqués. Comme vu précédemment, cela s’explique par les différences de catégories socioprofessionnelles entre la Seine-Saint-Denis et les autres départements étudiés.

Cela se traduit également par le taux de pauvreté du département qui est beaucoup plus élevé, avec un taux de pauvreté en 2019 de 27,9 %, contre une moyenne de 15 % dans les départements voisins.

Ces données viennent ainsi confirmer l’hypothèse initiale du présent mémoire de recherche quant au manque de population de la classe moyenne et aisée sur le territoire. Pour répondre à cette problématique, le département de la Seine-Saint-Denis doit donc renforcer son attractivité auprès des populations cadres.