Le procédé constructif Nano®

Une flexibilité de conception et de transformation pour de nouveaux modèles économique et urbanistique

Damien Cacouault

p. 46-49

Citer cet article

Référence électronique

Cacouault, D. (2021). Le procédé constructif Nano®. Dans I. Maleyre, C. Veil, C. Cantuarias-Villessuzanne & A.-C. Chardon (dir.), Immobilier durable. De la ville d’aujourd’hui à la cité de demain (p. 46-49). Mis en ligne le 01 septembre 2021, Cahiers ESPI2R, consulté le 16 avril 2024. URL : https://www.cahiers-espi2r.fr/151

Alors que la construction modulaire en bois répond initialement à des besoins sociaux impérieux ou à une volonté de favoriser l’accès à la propriété, Agilcare Construction s’empare d’un nouvel enjeu de taille : l’urgence environnementale, doublée d’un changement de modèle économique et social. Le procédé Nano® propose ainsi une autre façon de créer la ville grâce à la construction renouvelable.

L’indispensable logique de cycle dans la construction

Le béton a permis, par sa facilité de production et son faible coût, la nécessaire production en masse de logements. Mais son utilisation n’est désormais plus viable sur le plan écologique.

L’eau et le sable se raréfient ; leur surexploitation engendre des conséquences humaines et environnementales irréversibles.

Les déchets issus du secteur du BTP représentent par ailleurs un problème fondamental, à la naissance comme en fin de vie des bâtiments. Leur obsolescence, généralement liée à l’évolution des besoins et/ou de la réglementation, des normes, conduit à des modifications qui génèrent inévitablement des déchets (travaux d’agencement intérieur, changement de revêtements…).

Si des filières de recyclage et de réemploi se mettent en place afin de résorber cette pollution, moyennant un coût important, il est devenu indispensable de repenser le bâtiment de manière à ce qu’il puisse s’adapter sans générer de déchets. C’est tout l’enjeu que porte l’économie circulaire, qui vise à réutiliser et à recycler le maximum de matériaux issus, notamment, des transformations et des déconstructions.

Figure 1. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 1. Chantier de bureaux à Clamart (92).

© Luc Maréchaux.

Industrialiser sans renoncer à la qualité architecturale

S’inspirant des expériences qui réconcilient architecture et industrialisation – « maisons catalogues » venues d’outre-Atlantique, « maison des jours meilleurs » par Jean Prouvé, imaginée à la suite du terrible hiver 1954 –, Agilcare Construction rejoint les modernistes dans leur idée de standardiser la construction, comme on produit des meubles.

La préfabrication en usine offre en effet cette faculté de rationaliser la consommation des matières premières et de mesurer précisément l’énergie utilisée. Quant à l’assemblage sur site, il réduit drastiquement les déchets générés ainsi que les nuisances de chantier. À cela s’ajoute un gain potentiellement fort de productivité, alors même que la croissance de ce dernier, dans le secteur de la construction, stagne.

Or, à juste titre, les constructions préfabriquées ont longtemps été critiquées pour leur manque de valeur architecturale, ce qui explique les freins à l’industrialisation de ce domaine d’activités. Mais les architectes se sont aujourd’hui approprié ce procédé pour proposer des projets d’une plus grande qualité architecturale. L’évolution des techniques, la variété des matériaux utilisés et la volonté de repenser la construction élargissent les horizons du secteur du bâtiment.

Figure 2. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 2. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Construction pérenne, déplaçable si besoin.

© Luc Maréchaux.

La préfabrication selon Nano® : écoconception et réemploi

C’est ainsi que depuis 2010 les deux architectes fondateurs d’Agilcare Construction travaillent au développement d’un nouveau procédé constructif, Nano®, conçu pour réemployer de manière successive les éléments qui composent les bâtiments. Arrivé à maturité, Nano® ouvre alors un marché encore inexistant, celui de la construction renouvelable.

Cette solution repose sur un principe simple : des éléments, de petite taille et standardisés, s’assemblent, se désassemblent, se réassemblent au gré des nécessités, de manière à réinventer un même bâtiment.

Ils prennent la forme de panneaux structurels en bois qui permettent aux architectes d’œuvrer librement à la conception architecturale afin de répondre précisément aux besoins de chaque projet. Ainsi, la production de déchets est restreinte à la fois lors de la fabrication, des transformations et en fin d’usage.

L’élément Nano® est également écoconçu ; le bois utilisé est prélevé au sein de forêts gérées durablement et situées à proximité des chantiers. Respectant toutes les normes de la construction et se positionnant au-dessus des standards, ce procédé constructif peut être utilisé pour la construction temporaire ou pérenne de logements collectifs, de bureaux, d’équipements publics tels que des crèches, des salles de classe, des bâtiments administratifs…

Figure 3. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 3. Chantier de bureaux à Clamart (92).

© Luc Maréchaux.

Vers une économie de la fonctionnalité de l’immobilier

Flexible à l’envi, la solution Nano® fait poindre un modèle économique encore jamais envisagé par le secteur de la construction : l’économie de la fonctionnalité, dans laquelle c’est l’usage du bâtiment réalisé sur mesure qui est commercialisé et non les m². Elle s’impose en effet comme le nouveau mode de consommation qui fait primer l’usage sur la possession. Au cœur même de nos vies quotidiennes, le bâtiment doit, lui aussi, pouvoir offrir cette agilité si indispensable à nos nouveaux rythmes de vie comme aux mutations des usages. Et ce en étant réversible, évolutif et renouvelable.

Pouvoir transformer un bureau vacant en logement ou encore un ancien commerce en crèche, par exemple, constitue un atout énorme pour une collectivité, en mesure ainsi d’ajuster son patrimoine bâti aux besoins sociaux. Transformables et déplaçables, les constructions s’adaptent aux exigences temporelles et géographiques.

Dès lors, un bâtiment d’extension pourrait être loué et récupéré par le bailleur lorsque le besoin disparaît. De la même manière, un bâtiment modulaire pourrait être acheté puis revendu pour un autre usage, voire une déconstruction totale, fournissant par conséquent des matériaux supplémentaires pour d’autres édifices annexes… En outre, ce modèle économique permet d’exploiter un bâtiment dédié sans avoir à en supporter l’investissement, celui-ci s’amortissant ainsi sur des projets successifs.

Figure 4. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 4. Chantier de bureaux à Clamart (92).

© Luc Maréchaux.

Une adaptation impérative de la réglementation à un « urbanisme temporaire »

Pour ce faire, la réglementation doit accompagner voire encourager ce changement de paradigme. Actuellement, elle n’est aucunement adaptée au caractère flexible des bâtiments de demain : de la durée de délivrance démesurément longue des permis de construire comme de déconstruire, aux permis limités à des usages spécifiques, le monde juridique n’est absolument pas en phase avec les usages de cette économie de la fonctionnalité de l’immobilier, ni même à ses besoins parfois de plus en plus urgents ou temporaires (logements pour les migrants, crèches temporaires, raouts événementiels...). C’est précisément cette spécificité de la durée limitée que les textes réglementaires doivent aujourd’hui pleinement intégrer.

De ce point de vue, la tenue des jeux Olympiques (JO) à Paris, en 2024, laisse présager quelques évolutions optimistes. Le Code de l’urbanisme prévoit un contexte réglementaire adapté à l’événement via, entre autres, un permis de construire à deux usages autorisant la transformation du village olympique en bureaux.

Enfin, le procédé Nano®, en alliant flexibilité, économie d’espace, maîtrise financière et gain de temps, faciliterait la revalorisation des friches, et pas uniquement dans un but récréatif. Le choix de bâtiments modulaires démontables permet effectivement d’imaginer de nouvelles manières d’occuper les friches, en y accueillant des activités temporaires dans de bonnes conditions puisque les constructions non permanentes ainsi réalisées s’adapteraient au terrain.

Pour répondre à des usages tels que le logement, les friches doivent devenir des espaces vraiment qualifiés. D’où l’importance du développement d’un procédé constructif temporaire, comme Nano®, intégrant un impératif de qualité architecturale et fonctionnelle.

Il faudrait également que la réglementation envisagée pour les JO puisse jouir d’un état définitif une fois ces derniers terminés, et ce afin de pouvoir enfin assurer au bâtiment sa destination transitoire, seul gage de sa flexibilité.

Néanmoins, pour que cette démarche puisse être crédible et durable, il faut, comme tout droit, y opposer des devoirs. Il apparaît donc primordial que ces nouveaux modèles, tels que le permis « à usages successifs », soient conditionnés à une gestion responsable des déchets. Ceci doit être une contrepartie indispensable à ces projets d’un nouveau genre qui allient réponse aux besoins actuels et agilité d’adaptation aux besoins futurs.

Figure 1. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 1. Chantier de bureaux à Clamart (92).

© Luc Maréchaux.

Figure 2. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 2. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Construction pérenne, déplaçable si besoin.

© Luc Maréchaux.

Figure 3. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 3. Chantier de bureaux à Clamart (92).

© Luc Maréchaux.

Figure 4. Chantier de bureaux à Clamart (92).

Figure 4. Chantier de bureaux à Clamart (92).

© Luc Maréchaux.

Damien Cacouault

Responsable développement
Agilcare Construction

© Groupe ESPI.